Comment la Belgique est-elle devenue la référence européenne du café ?

Quand on vous dit café, vous pensez naturellement au Brésil, à la Colombie ou à l’Ethiopie, pays tropicaux exotiques, loin de nous, qui produisent le grain délicieux que l’on boit tous les jours. Pour rappel, 80% des Belges boivent au moins une tasse de café par jour.

Mais savez-vous que c’est en Belgique que (presque) tout se passe ? Près de 50% du café européen transite par notre petit pays au travers de l’un des plus grands ports de la planète : Anvers. Ce hub logistique est le plus important lieu de stockage de café brut au monde ! Il est loin devant Hambourg (17%), Brême (13%), Gênes (13%), Trieste (6%) et Le Havre (4%). Le café qui y est débarqué est la matière première que les torréfacteurs de toute l’Europe s’arrachent pour en faire la boisson que nous connaissons.

Anvers et Zeebrugge, une porte d’entrée incontournable pour le café en Europe

La Belgique est le premier ré-exportateur de café vert européen, c’est-à-dire que des milliers de conteneurs remplis de sacs de café quittent le pays pour approvisionner l’Allemagne, les Pays-Bas, la France et l’Italie pour ne parler que des plus gros consommateurs. Il y a chaque jour plus de 250 000 tonnes de café qui reposent dans les immenses entrepôts d’Anvers, l’équivalent de 27 milliards de tasses de café !

C’est pour l’incroyable modernité de ses infrastructures que le port d’Anvers est devenu une plaque tournante incontournable pour les importateurs de grain vert. A titre d’exemple, ses entrepôts sont climatisés pour maintenir le grain dans un état de préservation optimal, cette sécurité est particulièrement appréciée par les marchands de café pour qui le risque principal est la perte de qualité de la matière première après le long voyage en cargo (parfois plusieurs mois de transit en mer pour les cafés les plus exotiques). Presque aucun port du monde ne propose des infrastructures d’une telle qualité.

Port d'Anvers



Une fois en Belgique, le café peut être livré aux torréfacteurs par voie maritime, fluviale, routière ou train ; Anvers s’est équipé d’axes de distribution de pointe pour approvisionner le reste du continent. C’est aussi en raison de la stabilité du climat belge, ni trop froid, ni trop humide, que Anvers et Zeebrugge se sont hissés à la première place de la logistique mondiale du café et on d’ailleurs décidé en 2021 d’associer leurs forces pour ne devenir plus qu’une seule entité : le “Port of Antwerp-Bruges”. La logistique belge a encore de beaux jours devant elle !

Mais alors, quel café boivent les Belges ?

Avant de décortiquer l’histoire d’amour qui lie notre pays au café, il est important de rappeler que l’Europe est la région du monde qui compte les plus gros buveurs de café de la planète. La Finlande bien sûr avec ses 12 kg de café par habitant par an, mais aussi plus proche de nous, les Pays-Bas (8,4 kg) quand en Belgique on en consomme en moyenne (6,8 kg), soit plus qu’en France (5,5 kg).

Les usages et l’éducation des consommateurs évoluent aussi. On observe une hausse très nette de la demande des Belges pour des cafés certifiés Rainforest Alliance, UTZ, Commerce équitable et Agriculture biologique. Même si ces cafés représentent encore une niche, la tendance est à la consommation responsable soutenant à la fois le travail effectué par les producteurs en origine et la préservation de l’environnement avec des pratiques de production respectueuses des sols, de la flore et de la faune locale. C’est pourquoi toutes les enseignes de la grande distribution du pays comme Lidl, Delhaize et Aldi proposent une gamme de cafés certifiés.

De nombreux micro-torréfacteurs de café de spécialité (que l’on peut aussi appeler “cafés grand cru”) proposent également des cafés certifiés.

Où trouve-t-on du bon café en Belgique ?

A la question, “boit-on du bon café en Belgique ?”, la réponse est bien évidemment oui ! On note une concentration astronomique de micro-torréfacteurs sur le si petit territoire qu’est la Belgique. Certains sont même des pionniers du café de spécialité en Europe comme Caffènation qui a lancé une tendance qui dure depuis plusieurs années avec l'émergence de nombreuses enseignes comme Kolonel Coffee Roastery, MOK Specialty Coffee and Bar, Parlor Coffee Roasters. Certains coffee bars historiques de la capitale ont même choisi de renoncer à importer du café déjà torréfié pour torréfier eux-mêmes leurs grains afin d’offrir à leurs clients une expérience nouvelle : du café frais à la demande.

Méthodes d'extraction du café - mojoe

On trouve aussi des jeunes animés par la démocratisation de la consommation de café de qualité pour tous, au travers de tours et cours en partenariat avec des experts du goût comme La Fruitière (fromages), Cokoa (pâtisseries), Misao (poivres) ou Khobz (pain). Afin de permettre à ses clients de voyager au travers de leur café quotidien, la nouvelle plateforme belge MOJOE dédiée au café propose un abonnement dans lequel chaque mois ils reçoivent des cafés différents envoyés par les meilleurs torréfacteurs du pays : fini le casse-tête de la boîte de café vide le matin et bonjour la découverte sensorielle !

La demande pour du café de très bonne qualité n'a jamais été aussi forte

Avec le COVID, les amateurs de café en Belgique ont pu découvrir les joies de préparer du bon café chez eux. De nombreux coffee bars ont ouvert et les études montrent que le consommateur est de plus en plus éduqué sur le café qu’il boit. La plus grande concentration de ces établissements se trouve principalement dans les grandes villes comme Bruxelles, Anvers et Gand. En plus de proposer des mélanges (assemblages de cafés de pays différents), les bars à café proposent des cafés d’origines pures, en général réservés aux amateurs confirmés.

De manière plus générale, l’Europe est le plus gros et le plus important marché pour les cafés de spécialité avec les Etats-Unis. Cela se traduit par l’explosion du nombre de nouveaux coffee shops spécialisés en cafés d’exception et de la demande des consommateurs européens pour des cafés exotiques, rares et aux processus de fermentation innovants. Ce sont ces micro-torréfacteurs qui permettent l’introduction de ces nouveaux produits dans les différents pays. Consommer chez eux c’est tout simplement être un acteur actif de la révolution gustative dans laquelle nous nous trouvons actuellement.

La Belgique, à la pointe de la recherche scientifique

Le département de recherche du Jardin botanique de Meise fait figure de référence mondiale au même titre que le CIRAD en France lorsqu’il s’agit de café. Les liens historiques qui unissent la Belgique au Congo, probable berceau du café robusta, font que de nombreuses initiatives scientifiques sont menées afin de comprendre cette plante, de la préserver face au réchauffement climatique et d’en valoriser les espèces sylvestres.

Jardin botanique de Meise - Congo


Credit @plantentuinmeise

Le café arabica, qui est une plante très fragile, risque de disparaître en raison de la hausse des températures, des nouvelles maladies et champignons qui mettent en péril la productivité des cultures (on pense par exemple à la rouille qui a décimé une très grande partie des exploitations de café sur le continent américain à partir de 2012). Son cousin, le café robusta (coffea canephora), est une plante plus résistante mais plus pauvre génétiquement (22 chromosomes contre 44 pour l’arabica), et est de fait moins riche en notes aromatiques et en complexité gustative. Néanmoins, la demande pour le café de qualité, comme nous l’avons vu, ne cesse de croître. Au niveau mondial, on attend une croissance annuelle de 5,5% de la demande pour du café entre 2020 et 2025.

Afin de répondre à cette demande, les chercheurs recommandent que la collection de café de Yangambi (RDC) soit complétée par une diversité d'origine cultivée et sauvage provenant de l'ensemble du bassin du Congo. En effet, les caféiers sauvages locaux et les variétés oubliées contiennent une grande diversité génétique qui peut permettre aux sélectionneurs de rendre le café robusta cultivé plus savoureux et plus résistant au climat et aux maladies.

Pour ces recherches, le Jardin botanique de Meise collabore avec l’Institut flamand de recherche pour l’agriculture, la pêche et l’alimentation (ILVO), le Musée royal de l’Afrique centrale (MRAC), l’université de Louvain (KU Leuven, Belgique), l’université de Kisangani, le CRSN (Centre de recherche en sciences naturelles) de Lwiro et l’INERA.


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