Hummm… c’est quoi le pairing et comment bien le faire ?
Aujourd’hui on passe au niveau supérieur 🦸
La science de marier des aliments ensemble...
Ça fait plusieurs mois qu’on se connaît maintenant. Alors d’abord, merci de me lire, ça veut dire que vous apprenez des trucs grâce à mes mails, et pour moi, c’est le plus important.
La bonne nouvelle du jour, c’est que vous n’êtes plus du tout un·e débutant·e du goût. On a vu ensemble quelques mécanismes de base comme la méditation gustative, l’orgasme sensoriel, la gourmandise, le comfort food ou le jeûne...
En parallèle, vos connaissances sur le café ont explosé : comment le choisir, comment le préparer (avec une French Press, une Chemex ou une Aeropress), mieux comprendre les problèmes de cette industrie et ses forces, etc…
Pour l’occasion, comme on passe au niveau supérieur, j’avais envie de parler de pairing (en français : association, accord, mariage) entre cette boisson et… tout le reste. Je vous raconte.
1. Les traditions du café associé à…
Que vous buviez du café ou non, vous savez certainement que certaines personnes adorent tremper leur tartine de confiture dans leur café. Pas hyper chic mais super bon.
Dans certaines régions du monde, on va un peu plus loin dans l’audace gustative.
Par exemple, à Barcelone, on prend son café avec une tartine de pain à la tomate (pa amb tomàquet), au Brésil, impossible de boire un cafezinho sans un petit pain au fromage (pão de queijo), à Oaxaca au Mexique, certains y mettent un goutte de mezcal (pour avoir testé, ça réveille !). Dans la culture bédouine, on prépare le café avec de la cardamome (Gahwa Arabiyyah) et dans de nombreux pays africains on boit son café avec… du poivre (café Touba).
La tartine de confiote ne paraît plus du tout transgressive, on est d’accord.
C’était sans compter sur notre botte secrète : dans le Nord de la France et en Belgique, il existe une vieille tradition ouvrière de tremper du maroilles dans sa jatte de café.
Beurk !
Beurk ? Attendez…
2. La science du pairing
Pour réussir des associations originales, il y a deux règles :
- Essayer
- Se tromper
Heureusement, il y a quelques guides pour gagner du temps et éviter de jeter toutes ses créations à la poubelle.
Moi j’utilise Le répertoire des saveurs de Niki Segnit (je ne la connais pas et il n’y a pas de placement de produit, je trouve juste ce bouquin très cool).
On a vu qu’il y avait plusieurs goûts : sucré, salé, acide, amer, umami (piquant, gras, astringent aussi mais restons simples). Chaque aliment est composé d’une combinaison de ces goûts.
Lorsqu’on associe des aliments, on essaie soit de déguiser une saveur, de la soutenir, de la tempérer ou de l’animer. Et comme on le sait, 80% de notre expérience gustative est définie par l’odorat, c’est pourquoi les associations de saveurs qui fonctionnent sont celles qui forment des accords aromatiques puissants.
Sur ce schéma, on voit comment les goûts peuvent atténuer (les flèches en foncé) ou au contraire mettre en avant les autres (les flèches claires). Par exemple, ajouter du sel dans un plat fera ressortir son goût sucré mais atténuera son amertume. Petite astuce utile.

Bien entendu, il n’y a pas que le goût qui permet de créer une combinaison intéressante : la texture et la température sont également deux éléments fondamentaux.
Prenons l’exemple du maroilles au café. Goûtés indépendamment, on a d’un côté un fromage très fort qui pue un peu, soyons honnêtes, et de l’autre, un café amer (je simplifie mais c’est pour mieux comprendre).
Sauf qu’une fois qu’on associe ces deux aliments, en trempant une tartine de maroilles dans son café par exemple, on obtient quelque chose de beaucoup plus complexe et surtout, d’équilibré. Et l’équilibre, c’est la clef d’une cuisine réussie.
D’abord, la chaleur du café va modifier la texture du fromage en le rendant plus crémeux. Ensuite, si le café choisi est un café fruité (comme un éthiopien ou un kényan par exemple), on fera ressortir les notes sucrées et végétales du maroilles, un café plus rond rendra ses notes de noisette davantage perceptibles en bouche.
Intriguant non ?
Y a pas à dire, les mineurs du Nord savaient ce qu’ils faisaient.
En Normandie, il existe même la confrérie des Amateurs de TArtines au Camembert dans le Café (ATACC).
Nos régions ont du talent.
3. Après la théorie, la pratique
Comme on est dans la cour des grands, j’ai trouvé deux ateliers à faire pour mieux comprendre ce mécanisme.
1️⃣ Du café aux épices
Mes copains Mariana et Roman, les fondateurs de Otara Kava, ont développé avec Misao, premier bar à épices de Bruxelles, un café guatémaltèque au poivre de Selim récolté au Congo. Perso, je n’ai jamais vu ça ailleurs.
Le poivre apporte de l’énergie et de la fraîcheur grâce à ses notes d'eucalyptus et de menthol, mettant en avant la douceur orangée du café. Pour compléter le tout, une douce chaleur épicée englobe ce mélange. Ce café est bon pour la santé et serait même bénéfique contre la maladie d’Alzheimer et le diabète de type 2…
2️⃣ Combiner du café et du fromage
Thomas, qui organise d’excellents ateliers autour du café, propose depuis peu avec Véronique, fondatrice de La Fruitière, fromagerie et bar à fromage incontournable de Bruxelles, une dégustation de cafés de spécialité et de fromages d’exception. À ma connaissance, il n’y a aucun autre atelier de ce niveau. Si vous avez besoin de confirmation, Véronique a été médaillée premier fromager de Belgique en 2016. Ça ne rigole pas.
Si vous devez retenir une seule chose de ce mail, c'est que
Vous faites partie des 0,01% des personnes à comprendre les mécanismes du goût, bravo pour votre curiosité ! Combiner les saveurs n’est pas une chose simple et il n’y a pas de recette universelle, c’est pourquoi certaines cuisines, très éloignées de notre culture originelle peuvent parfois rebuter, voire dégoûter.
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